Se tourner vers l’avenir : du papier et du stylo à l’agriculture assistée par IA
La prospection en lutte intégrée : passer du papier à l'IA en pratique
Aujourd’hui, la prospection dans le cadre de la lutte intégrée repose encore largement sur des observations de terrain dans les cultures et sur des notes manuscrites. La plupart des formulaires utilisés comportent, comme ceux que nous avons examinés, des lignes structurées avec des rubriques telles que :
- Stade de la culture
- Organisme nuisible/maladie observé(e)
- Nombre par plante ou par piège
- Emplacement ou bloc
- Seuil d’intervention atteint ?
- Notes et recommandations
Ce système est familier et fonctionnel, mais il est chronophage, difficile à appliquer à plus grande échelle, et les données collectées sont rarement exploitées au-delà du moment de la saisie.
Exemple concret : déroulement de la prospection aujourd'hui
Scénario : un prospecteur inspecte des agrumes pour détecter la présence de cochenille rouge.
Bloc | Stade de la culture | Nuisibles par feuille | Seuil atteint | Mesures prises |
|---|---|---|---|---|
A3 | Feuilles développées | 7 | Oui | Pulvérisation d'huile |
Ces informations sont remplies à la main, souvent à l’aide de porte-blocs usés par le temps, puis elles sont scannées, saisies dans un tableur ou archivées dans un classeur.
Mise en œuvre pratique avec l'IA et un logiciel de gestion agricole
Que vous soyez petit exploitant dans une zone rurale avec une couverture réseau limitée ou gestionnaire d’une exploitation commerciale de grande envergure dotée d’équipements de précision, il est possible de passer à une prospection en lutte intégrée assistée par IA, en l’adaptant à votre échelle et à vos moyens.
Pour les petites et moyennes exploitations en zone rurale :
- Prenez des photos des nuisibles et des symptômes sur le terrain à l’aide d’un smartphone standard ; importez les données ultérieurement lorsque vous serez connecté.
- Accédez aux données météo localisées provenant de services publics intégrés à la plateforme.
- Bénéficiez de suggestions assistées par IA qui évoluent en fonction des entrées effectuées sur le terrain au fil du temps ; aucun matériel coûteux n’est nécessaire.
Pour les exploitations commerciales dotées d'une infrastructure numérique :
- Intégrez directement des capteurs IoT, des drones et des stations météo connectées au logiciel de gestion agricole.
- Automatisez la collecte de données sur de larges zones de culture, afin de permettre à l’IA de fournir des informations et des stratégies de traitement ciblées par zone.
- Utilisez des jeux de données historiques pour alimenter des analyses prédictives sur plusieurs saisons et cultures.
Dans les deux cas, les principes restent identiques : utiliser des outils pratiques pour remplacer progressivement les tâches répétitives, améliorer la logique de décision et réduire l’écart entre les observations de terrain et les interventions qui en découlent.
La section suivante explique comment Farmable accompagne cette évolution en situation réelle :
- Les agriculteurs ou les prospecteurs utilisent leur smartphone pour consigner leurs observations, prendre des photos et enregistrer la présence de nuisibles ou de maladies directement dans la parcelle.
- Le positionnement GPS est intégré dans les appareils mobiles, de sorte que même sans drone, les emplacements des parcelles sont automatiquement suivis.
- Les données météo sont issues des services météorologiques régionaux, ce qui permet au système de fournir des alertes contextuelles (par exemple, « Forte humidité cette semaine – surveiller l’oïdium »).
- Les fonctionnalités de l’IA sont d’abord modestes : suggestions automatiques basées sur le type de culture, l’historique des nuisibles et le moment dans la saison.
- Avec le temps, la reconnaissance d’images peut être intégrée à l’aide des caméras de smartphones ordinaires ; aucun drone n’est nécessaire. Une simple photo de feuille peut permettre d’identifier le stade de développement d’un organisme nuisible ou les signes de stress d’une maladie.
La lutte intégrée numérique devient ainsi non seulement accessible, mais aussi pratique pour les exploitations agricoles qui doivent gérer des contraintes concrètes. Le changement ne consiste pas à passer à une technologie de pointe du jour au lendemain : il s’agit de tirer le meilleur parti de chaque tournée de prospection, même avec des budgets limités et une infrastructure minimale.
Au-delà de l’aspect pratique, l’avenir de l’IA dans la prospection en lutte intégrée est aussi une question de structuration et de profondeur d’analyse des observations. Les formulaires de prospection actuellement utilisés, comme ceux décrits dans notre documentation interne, permettent de saisir un contexte incroyablement riche :
- Conditions environnementales : météo, humidité du sol, température
- État sanitaire des cultures : stade de croissance, symptômes (chlorose, nécrose, retard de croissance, etc.)<>>
- Présence de nuisibles : type, nombre, stade de développement, répartition
- Auxiliaires : ennemis naturels ou pollinisateurs observés
- Logique d’action : seuils atteints, type d’intervention, suivis.
Ces rubriques ne vont pas disparaître. En fait, elles constituent la base exacte sur laquelle l’IA va s’appuyer. Mais à la différence des notes manuscrites, l’IA pourra :
- extraire automatiquement les données météo et sol depuis des capteurs
- utiliser la vision par ordinateur pour détecter des symptômes comme la chlorose ou la défoliation
- suivre les cycles biologiques des nuisibles à partir de relevés de pièges et de photos
- recouper ces observations avec des seuils économiques
- proposer des mesures de lutte biologique ou chimique directement liées aux résultats de prospection
Ainsi, l’IA ne va pas remplacer la logique agronomique, mais plutôt la renforcer, en transformant des notes de terrain autrefois isolées en informations en temps réel à l’échelle de la parcelle, afin d’améliorer le calendrier, la cohérence et la prise de décision.
Voyons comment chaque élément de ce formulaire sera remplacé ou amélioré au fil du temps, en trois étapes :
Données parcelle | Processus papier | Outils numériques actuels | Intégration IA future |
|---|---|---|---|
Stade de la culture | Saisie manuscrite dans le formulaire | Menu déroulant dans l'application mobile | Détection automatique par imagerie satellite ou modèle de croissance |
Comptage des nuisibles | Comptage visuel et saisie manuscrite | Saisie dans l'application | Prise de photo – l’IA compte automatiquement les nuisibles à partir de l’image |
Localisation | Rédaction ou dessin à la main | Géolocalisation par GPS lors de la saisie | Cartes thermiques générées automatiquement à partir de relevés de drones ou de capteurs |
Seuil de décision | Comparaison visuelle avec mémoire/graphique | Courbes de seuil affichées dans l'application | Alerte de l'IA si le seuil est atteint selon la combinaison culture/nuisible |
Recommandation d'action | Rédigée par le prospecteur ou le conseiller en agronomie | Notes manuscrites | Réponse proposée par l'IA (p. ex. : produit, calendrier, méthode) |
Journée type : le déroulement réaliste de la prospection de demain
- Le prospecteur ouvre l’application et crée une nouvelle entrée. Le GPS enregistre automatiquement la localisation du bloc.
- L’IA indique les points à vérifier en fonction du stade de développement de la culture et des prévisions de risque d’infestation de nuisibles.
- Le prospecteur prend une photo de la face inférieure d’une feuille. L’application détecte les organismes nuisibles et les compte.
- Le système compare le résultat au seuil spécifique défini pour ce stade de culture et affiche la décision correspondante.
- Si une intervention est nécessaire, le prospecteur clique pour l’enregistrer ou déclenche directement une tâche de pulvérisation dans le module des opérations.
- Toutes les données sont enregistrées, horodatées et contribuent à l’élaboration de modèles futurs.
L’impact concret sur vos décisions de lutte intégrée
- Moins d’erreurs : pas de données manquantes, d’écriture illisible, de lignes oubliées.
- Une analyse plus rapide : pas besoin d’attendre la fin de la semaine pour évaluer la pression sur l’ensemble des blocs.
- Des décisions plus intelligentes : l’IA propose des seuils et des traitements adaptés aux conditions et au contexte historique.
- Une meilleure utilisation du temps : le prospecteur peut se consacrer davantage à l’observation qu’à la saisie répétitive d’informations.
Période de transition : comment s’opère le changement ?
- Dans un premier temps, il suffit de remplacer le papier par l’application mobile.
- Puis, les photos remplacent les champs réservés au comptage des nuisibles.
- Progressivement, l’IA ajoute des alertes intelligentes, mettant en évidence des tendances, des observations manquantes ou des données incohérentes.
- Enfin, l’automatisation complète devient possible : tâches déclenchées par l’IA et alertes prédictives.
L'objectif final
Pour visualiser cette transition :
Aujourd’hui : un agriculteur parcourt la parcelle avec un porte-bloc, et note les informations à la main : stade de culture, nuisibles observés, symptômes foliaires. Ces notes sont conservées, mais rarement réutilisées, sauf en cas de problème.
Demain : le même agriculteur parcourt la parcelle avec un smartphone. Il prend la photo d’un nuisible, note un stress végétal d’une simple pression, et le GPS enregistre automatiquement le bloc. L’IA aide à interpréter les données en indiquant si un seuil a été franchi ou si un suivi est nécessaire. Les données s’accumulent semaine après semaine, construisant une image fiable de l’état sanitaire de la parcelle.
À terme : l’agriculteur reçoit chaque semaine une notification : « Prospecter le bloc A — risque pucerons en hausse ». Il prend une photo, et le système la compare aux tendances précédentes. Si nécessaire, il propose une intervention ou recommande d’attendre. L’agriculteur décide alors en toute confiance, et pas seulement à l’instinct.
Il ne s’agit pas de remplacer l’expérience, mais plutôt d’offrir aux agriculteurs un outil qui reflète plus intelligemment l’état de leurs parcelles, un outil qui enregistre, compare et conseille, sans exiger plus qu’un tour de parcelle et quelques pressions sur l’écran de son téléphone.
Cet objectif ne relève pas de la science-fiction. Il s’agit de :
- Faciliter les tâches existantes.
- Tirer le meilleur parti de chaque tournée de prospection.
- Réduire les traitements inutiles.
- Permettre aux agriculteurs de voir les données sur les cultures en même temps que les prospecteurs, en temps réel, depuis leur smartphone.
C’est la voie réaliste à suivre : construite pas à pas, en partant des notes de terrain pour arriver à la reconnaissance de tendances, puis à une véritable aide à la décision. Ainsi, chaque agriculteur peut en bénéficier, quel que soit son point de départ.
Depuis des générations, l’agriculture s’est construite autour de la simplicité et de l’expérience pratique : le stylo, le papier et l’intuition étaient à la base des registres agricoles et des opérations quotidiennes. Les agriculteurs se fiaient à des notes griffonnées à la hâte sur des porte-blocs, à des données enfouies dans des piles de classeurs et à des observations consignées laborieusement à la main. Bien que ces méthodes aient façonné les traditions, le paysage agricole actuel, en constante évolution, exige des solutions plus rapides, plus précises et plus efficaces que les seules approches traditionnelles.